Enfer privé (Jean Rollin)

Lola est une prostituée de luxe qui, par l'intermédiaire de Madame Pierre, se vend à de riches pervers, soit pour son corps, soit pour ses talents de chasseuse. Mais il est difficile de résumer un tel récit sans entrer dans ce qu'il nous a fait ressentir. Un ami qualifie parfois ses lectures de coups de poing, et c'est la définition la plus exacte que je peux donner à ce bouquin : un coup de poing au ventre, un coup de poing au coeur. Dès le début, on assiste à une chasse malsaine, reproduction des chasses du comte Zaroff, où la victime après capture passe de sexe en sexe. Lola fait partie des poursuivants, chargée de ramener la proie. Dès ce premier chapitre, on est plongé dans l'ambiance glauque et pervertie. Mais ce n'est qu'une mise en bouche. Lola sur la route de son manoir fait une étrange rencontre en la personne d'une petite sauvageonne évoluant entre falaise, galets, et mer. La prostituée est subjuguée par la beauté sauvage de l'enfant qui aussitôt l'obsèďe. L'obsèďe au point de la capturer, pauvre enfant-loup sans existence officielle bientôt enfermée dans les caves de Lola qui, incapable de retrouver le miracle de leur première rencontre, développe une haine violente pour sa captive qu'elle se met en devoir de soumettre et dresser ainsi qu'on le ferait d'un animal de cirque. Avec un but encore plus noir : vendre sa virginité au plus offrant.

Difficile de sortir indemne d'une telle plongée dans ce que l'humain a de plus vil. L'enfant est pour tous, au mieux un animal, au pire un objet, mais toujours quelque chose dont on peut se servir et qu'on peut rudoyer. On souffre pour cette gamine, on la voudrait à nouveau libre, et pourtant, on sent que dans ce monde cruel, il n'y a aucun espoir. Le calice devra être bu jusqu'à la lie. Même si Lola semble changer, se prendre d'affection pour son jouet, rien ne détournera les deux de leur destin,  de leur découverte du pire. Et ce revirement de Lola ne suffira pas pour la ramener à une vie autre, plus saine aurait-on envie de dire, car il lui manque la compréhension, elle croit aimer, elle n'a que l'affection possessive pour un jouet. Et elle ne découvrira le véritable amour qu'au moment de sa mort.

Rien dans ce roman ne permet de se raccrocher à une bouée quelconque, il n'y en a pas, tout y est noir, glauque, malsain, dérangeant, et le lire fait mal. Oui c'est un roman coup de poing que je conseille à ceux qui chreche des lectures qui frappent.

 

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